Si de nombreux idioms, comme on les appelle en anglais, puisent leur origine dans le domaine de l’art (occuper le devant de la scène, ne plus pouvoir voir quelqu’un en peinture, aller plus vite que la musique…), elles s’inspirent également du monde littéraire.
12 expressions idiomatiques littéraires
On ne présente plus les expressions idiomatiques, ces formules imagées et figées que l’on ne peut généralement traduire mot-à-mot. Mais saviez-vous que certaines de ces Redewendungen s’avèrent très similaires en français, en allemand et en anglais ?
Si les six expressions ci-dessous se ressemblent comme deux gouttes d’eau, de légères différences demeurent.
Les trois langues, par exemple, s’accordent sur le fait que, lorsqu’un lecteur ne quitte plus des yeux un ouvrage, son nez semble y disparaître. Le français et l’anglais utilisent sobrement les verbes "avoir" et "to have", tandis que l’allemand, plus dynamique ici, préfère "stecken", qui peut se traduire par "enfoncer".
Lorsqu’il est possible d’anticiper les intentions d’une personne, elle devient visible, lisible… "comme un livre ouvert". Détail intéressant, contrairement aux deux autres langues, l’expression "être un livre fermé" n’existe pas dans la langue de Molière !
Si vous déchiffrez une œuvre dans son intégralité, vous le lisez de la première à la dernière page, en français comme en allemand. Cette fois, c’est l’anglais qui se distingue par sa littéralité : on commence par la première de couverture, sans oublier la quatrième !
Il faut dire que les anglo-saxons ponctuent très régulièrement ces dernières citations élogieuses rédigées par des critiques littéraires ou des journalistes. Personnellement, je ne les lis qu’à la fin. Je préfère préserver mon horizon d’attente et me laisser surprendre.
3 expressions liées au livre
3 expressions liées à la lecture
Le plus souvent, les expressions idiomatiques diffèrent drastiquement d’une langue à l’autre. Un rat français devient par deux fois un "ver de livre". Alors qu’en réalité, ces parasites (parfois également nommés "poux") sont des insectes, en comprennent les poissons d'argent, les termites, les cafards, ou encore, pour changer de registre, des champignons… Si on me demande mon avis, j’aurais préféré être un "psoque" ou une "vrillette de bibliothèque". Juste pour les sonorités, bien sûr.
Dans certains cas, un concept, comme le fait d’être "book smart", s’avère intraduisible. Il est nécessaire d’opérer ce qu’on appelle, en traductologie[1], une transposition (changer de catégorie grammaticale) ou une modulation (modifier le point de vue), en utilisant un autre champ lexical, par exemple… Ainsi, lorsque l’intelligence d’une personne ne s’appuie que sur des ouvrages, elle sera en allemand "theoretisch versiert". Son pendant, "to be street smart", se traduit le plus souvent par "avoir une intelligence pratique".
Vous trouverez ci-dessous d’autres instances de modulations, dans lesquelles il est question, dans la langue de Shakespeare, d’histoires qui s’abrègent ou se terminent, de personnes sur la même page, ou de jugements de livres sur leur couverture… alors qu’en français, il sera question de longueur d’ondes et d’habit de moines (comme la coule, ou la cuculle, pour ne pas la nommer)…
[1] Vinay, J.-P., Darbelnet, J., Stylistique comparée du français et de l'anglais (Paris : Didier, 1958).
3 expressions différentes du français
3 expressions liées au champ lexical de la lecture
Pour aller plus loin : pourquoi ne pas dénicher un livre sur les expressions idiomatiques, et partir à la pêche aux formules littéraires ? Parmi tant d’autres ouvrages dédiés au sujet, sont sortis récemment :
En 2022 :
En 2023 :
Un grand merci au Dr. Pierre Le Duff pour le "proofreading" de l’allemand !